Avant elle, le sport féminin, c’était plutôt de la danse, de la gymnastique rythmique ou du cerceau, mais grâce à Alice Milliat, les femmes ont eu accès à des clubs sportifs en football, hockey, rugby… Elle a même réussi à imposer les femmes aux Jeux olympiques.
À l’approche des Jeux olympiques de Paris, revenons sur une personnalité incontournable et pourtant oubliée du sport féminin : Alice Milliat, grande sportive qui s’est battue toute sa vie pour faire reconnaître le sport féminin et ouvrir tous types de sports aux femmes. “Ça ne plaisait pas à ces messieurs, j’aime mieux vous dire. Tous les hommes qui étaient autour ne l’aimaient pas tellement » raconte Jacqueline Laudré, multichampionne de courses de haies et ancienne coéquipière d’Alice Milliat.
L’accès aux sports virils
Née en 1884, Alice Milliat est une passionnée de sport et c’est à Londres où elle a suivi son mari qu’elle s’initie au hockey, au football et surtout à l’aviron dont elle sera championne.
Veuve à 24 ans, elle rejoint Paris et intègre le club Femina Sport qui propose surtout de la gymnastique rythmique et dansée. Elle est élue à la présidence du club en 1915 et l’ouvre à d’autres sports réputés plus virils : athlétisme, basket-ball, football, rugby, hockey, etc.
Entrainement de hockey féminin, 1925, Porte dorée. – Gallica
Des hommes s’opposent à cette féminisation et la polémique enfle comme on peut le lire dans un journal de décembre 1921 : « Ils nous refusent le droit au muscle parce qu’ils veulent rester les plus forts. Mais ils auront beau faire, notre sexe aura du biceps et du jarret, et ce sera tant pis pour vous messieurs les tyrans ! Le muscle de la femme est en route et rien ne l’arrêtera. »
Alice Milliat estime que pour changer les choses, les clubs féminins doivent être dirigés par des femmes. Elle est l’une des fondatrices de la Fédération des Sociétés Féminines Sportives et en prend la tête en 1919, devenant ainsi la seule femme au monde à la tête d’une fédération nationale sportive féminine.
Les Jeux olympiques féminins
Alors que les femmes ne sont admises que dans certains sports aristocratiques aux J.O., comme le tennis ou l’équitation, Alice Milliat demande au comité de Pierre de Coubertin d’inscrire des épreuves féminines d’athlétisme. « Je n’approuve pas personnellement la participation des femmes à des concours publics” répond-il en ajoutant que « le rôle de la femme est, comme lors des anciens jeux, de couronner les vainqueurs ».
Face à ce refus, elle organise, en 1922, les premiers Jeux olympiques féminins à Paris, bois de Vincennes. Des athlètes françaises, anglaises, tchécoslovaques, américaines et suisses s’affrontent. Un succès.
« Elle avait un caractère, elle avait un ascendant, une puissance. Elle régnait sur le sport féminin comme une reine. On ne faisait rien sans elle, « se souvient Jacqueline Laudré a 94 ans, dans une interview de 2003.
On l’oblige à retirer le mot “olympique” de ses compétitions. Mais l’enthousiasme demeure et tous les quatre ans jusqu’en 1934, de plus en plus de pays participent. Pour contrer ce succès, les fédérations masculines finissent par accepter la participation des femmes à certaines épreuves olympiques, seulement 5 sur 13 en athlétisme par exemple.
Une mort anonyme
Les compétitions internationales féminines se développent pendant l’entre-deux-guerres, toujours sous l’impulsion d’Alice Milliat qui défend bec et ongles ses athlètes, comme nous raconte Jacqueline Laudré : « Un jour, on était à Turin pour une rencontre France-Italie, il y avait toute une équipe de jeunes italiens qui nous suivait, et je la vois toujours. Elle s’est retournée, elle a pris son parapluie, elle voulait leur taper dessus. Ça, ça m’est toujours resté. Elle était formidable avec nous. »
Alice Milliat, championne d’aviron, photographie de presse – Agence Rol
Dans les années 1930, les subventions aux sports féminins sont coupées. L’époque n’est plus aux revendications égalitaires et féministes et les femmes sont écartées des institutions sportives.
Alice Milliat meurt en 1957 dans l’anonymat, même sa tombe ne porte pas son nom.
Source : www.radiofrance.fr/franceculture/