© JD Lesay/ Patrick Appéré, président de l’Andes, et Vincent Saulnier, secrétaire général de l’Andes, à Limoges le 15 mai 2025

L’Association nationale des élus en charge du sport (Andes) tenait son 27e congrès les 15 et 16 mai à Limoges. Pour Localtis, son président, Patrick Appéré, et son secrétaire général, Vincent Saulnier, reviennent sur la très difficile conjoncture budgétaire du sport.

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Au-delà des aspects budgétaires, les ministres de l’Éducation nationale et des Sports cherchent à ouvrir les équipements scolaires aux clubs pour développer la pratique. Est-ce une solution ?

Patrick Appéré – C’est bien d’aller voir du côté des équipements utilisés par les scolaires, peut-être que certaines communes n’ont pas de bonnes relations avec l’Éducation nationale, mais globalement, c’est déjà fait. Et puis, les équipements sportifs appartiennent aux communes, pas aux écoles. Je ne vois donc pas comment l’école déciderait de ne pas prêter ce qui ne lui appartient pas. On laisse les équipements aux écoles en journée et le mercredi, mais le reste du temps, c’est à nous, on les prend. Dans beaucoup de villes aujourd’hui, les services font du Tétris. On peut toujours dire qu’il y a de la place dans les équipements, oui, mais de 13 à 14 heures le lundi après-midi. Si vous trouvez quelqu’un pour faire du sport à cette heure-là… Les clubs organisent tous les entraînements à peu près au même moment. À côté de ça, en ruralité, quand il y a une seule équipe de foot, la plupart du temps, le terrain ne sera pas utilisé. On ne peut pas gérer le modèle sportif qu’à partir d’un tableau Excel.

Vincent Saulnier – Il y a une expérimentation lancée dans quelques académies. On va l’apprécier, mais on pense que cela restera à la marge. On a aussi pointé les aspects réglementaires, pour mettre en sécurité juridique les responsables des établissements scolaires. Il y a une injonction paradoxale. On veut sacraliser l’équipement scolaire jusqu’à 17 heures et ensuite le rendre accessible sans difficulté. Le deuxième point est lié à l’optimisation des créneaux. On entend qu’il y a peut-être des choses à améliorer, mais globalement on s’emploie déjà à essayer d’optimiser tout cela.

Avez-vous observé un effet Jeux olympiques dans la fréquentation des clubs ?

Vincent Saulnier – Oui, il y a eu un engouement des Jeux avec une augmentation des licenciés dans un certain nombre de fédérations. Simultanément, on entend des fédérations partenaires, comme le basket, nous dire qu’elles ont refusé 180.000 licenciés depuis deux ans, avant même les Jeux. Et pour la fédération de natation, le sujet est tout simplement l’accès à des couloirs de nage alors que le parc des piscines français est aujourd’hui très obsolète et énergivore. Les limites sont là, même s’il y a eu de vrais efforts réalisés avec l’accélération donnée par les Jeux. Le plan 5.000 est un succès. Il était prévu sur trois ans, il a été réalisé sur deux ans, son déploiement est opérationnel, même s’il y a aujourd’hui un sujet budgétaire qui n’est pas anodin. Sur les équipements structurants, avec le Plan 5.000-Génération 2024, il y a plus de difficultés de mise en œuvre car on est sur des dossiers plus compliqués qu’un city stade ou un terrain de basket 3×3, avec des niveaux de décaissement différents. Je veux attirer l’attention sur l’alerte lancée par le député Benjamin Dirx selon lequel – c’est là le scandale – le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes demande l’annulation de l’ensemble des autorisations d’engagement non engagées en 2024, soit 44 millions d’euros, et des crédits de paiement non exécutés, soit 178 millions. Cela va se traduire potentiellement, nous le disons dès à présent, par une année blanche pour le sport au titre des équipements en 2026-2027. Or des engagements ont été pris, des équipements vont sortir et à un moment, il va falloir les décaisser. Et si on les décaisse en 2026-2027, on ne financera pas d’autres projets. Est-ce cela que l’État nous annonce ? Par ces actes, il contredit toutes les belles promesses de Paris 2024. On nous a promis un héritage des Jeux, mais le notaire a perdu le testament.

On le comprend, des nuages noirs s’amoncellent. N’y a-t-il pas cependant des pistes de réflexion pour revoir le financement du sport ?

Vincent Saulnier – Si, le 22 mai, à l’occasion d’une journée consacrée aux équipements sportifs au ministère des Sports, l’Andes présentera le projet « fonds Bleu » qui consiste à redéployer les certificats d’économie d’énergie (CEE). Alors que ce programme va sortir pour les quatre prochaines années, il y a sans doute une piste de financement pour les piscines en créant une fiche dédiée à ces équipements pour alimenter un fonds Bleu. Les CEE sont des outils sur lesquels on a de la visibilité et de la pérennité, sachant que la rénovation d’une piscine, c’est minimum cinq ans. Au seuil des élections municipales, il faut donner quelques marqueurs, des engagements forts aux équipes qui vont arriver. Et cela alors qu’il existe quatre cents intercommunalités rurales qui n’ont aucun équipement pour nager. Ce n’est pas parce que c’est compliqué qu’il faut s’interdire d’aller chercher d’autres sources de financement.

Une des ambitions de la réforme de la gouvernance du sport de 2019 était aussi d’avancer sur le financement privé du sport. Où en est-on ?

Patrick Appéré – L’idée à travailler aujourd’hui pour le mouvement sportif est de mieux s’engager dans l’économie sociale et solidaire du sport, pour que les clubs soient capables de conserver la notion d’intérêt général tout en construisant une économie qui leur permette de trouver des financements et de développer le sport fédéral dans les meilleures conditions. Prenons l’exemple du padel. Je connais des clubs de tennis dont la ville a construit le court de padel. Le club en a ensuite pris la gestion, a construit un modèle économique autour de cette pratique, et, grâce à cette manne financière, s’est retrouvé avec des possibilités de financement nouvelles et permanentes pour le développement du tennis. Il y a donc besoin aujourd’hui d’innovation pour créer les conditions d’un nouveau modèle économique du club.

Vincent Saulnier – On est sur une période transitoire. Alors que les clubs vont être interrogés au titre des missions de service public attendues, simultanément, ils devront résoudre l’équation économique, même si ce ne sera pas une réalité pour tous les territoires et toutes les disciplines. Le modèle de l’économie sportive et solidaire va de plus en plus émerger car on identifie clairement le club comme un acteur économique au même titre que le sport-loisir marchand. Et ce alors que, plus que jamais, les Français font du sport.

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Source : www.banquedesterritoires.fr