Les présidents des fédérations sportives, qui espéraient surfer sur l’effet JO, s’inquiètent de la baisse du financement du sport en 2025.

Hors crédits liés à l’organisation des Jeux olympiques, le budget du ministère des Sports doit diminuer de 114 millions d’euros selon le projet de loi de finances pour 2025 étudié par les parlementaires. 

« On imaginait un tremplin post-olympique et on a à peine un chemin ». Pour Philippe Bana, président de la Fédération française de handball, comme pour ses homologues à la tête d’autres fédérations sportives, le retour sur terre après l’été olympique et paralympique est rude. Le projet de loi de finances, en cours d’examen à l’Assemblée Nationale, prévoit une baisse du budget du ministère des Sports de 268 millions d’euros, dont une diminution mécanique de 154 millions d’euros liés à l’organisation des Jeux en 2024. Reste donc, hors dépenses liées aux Jeux, une baisse de 114 millions d’euros sur l’année 2025.

« D’un côté, on se dit qu’il faut qu’on participe tous à l’effort collectif. De l’autre, je suis inquiet et en colère, lâche Yohan Penel, président de la Fédération française de badminton. En colère parce qu’on n’a pas avancé sur la considération de ce que peut être le sport dans toutes ses dimensions, de ce qu’il peut apporter à la société et lui faire économiser, que ça soit dans la santé, l’insertion sociale, le bien-être, la déconstruction des stéréotypes de genre… Tant que le sport ne sera considéré que comme un acteur du divertissement, on sera la variable d’ajustement budgétaire ».

Les équipements sportifs au cœur des inquiétudes

Philippe Bana, qui a rencontré le nouveau ministre Gil Avérous, a, lui, été en partie rassuré par sa « volonté de se battre pour aller chercher des moyens », mais le président de la Fédération de handball reste inquiet de la situation des infrastructures sportives. « C’est un sujet majeur, car les fédérations de sports d’intérieur sont arrivées au craquage des infrastructures et depuis le 1er octobre, les clubs refusent des licenciés », affirme-t-il.

Son homologue de la fédération de tennis de table, Gilles Erb, abonde : « En France, on a un vrai déficit d’installations sportives. Beaucoup datent des années 1960. Peu ont été rénovées et certaines ne répondent plus aux attentes en termes de qualité d’accueil, d’autant que les associations sont des lieux de vie. Plus personne n’accepte l’absence de douches chaudes, qu’il n’y ait qu’un seul vestiaire pour filles et garçons mélangés, ou que le chauffage ne soit pas suffisant ».

Et la situation ne devrait pas s’améliorer de si tôt. Si le ministre Gil Avérous souhaite stabiliser les crédits accordés au sport de haut niveau, des économies sont prévues sur les équipements sportifs. Le plan « 5 000 équipements – Génération 2024 », qui prévoyait une dépense de 300 millions d’euros sur trois ans, va voir son enveloppe gelée pour 2025. Mais le ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative assure qu’il y aura quand même de l’argent : « Cette année, sur les 100 millions d’euros attribués, seuls 4 millions ont été dépensés. On a donc 96 millions de reports » pour 2025, déclarait Gil Avérous devant les parlementaires fin octobre. Il est également favorable, comme plusieurs parlementaires qui ont déposé un amendement dans ce sens, à un recours accru aux taxes prélevées sur les paris sportifs pour financer en partie ce plan « 5 000 terrains ».

Les efforts demandés aux collectivités territoriales inquiètent davantage

Autre source d’inquiétude pour les présidents des fédérations : les économies importantes demandées aux collectivités territoriales, à hauteur de 5 milliards d’euros. Elles sont « les premiers financeurs publics du sport en France », d’après le site du ministère des Sports, et participent à la construction ou l’entretien d’équipements sportifs, en plus de leur soutien financier aux clubs locaux. « C’est cette baisse de budget qui m’inquiète le plus, ça c’est vraiment catastrophique, s’alarme Guislaine Westelynck, présidente de la Fédération française handisport. Je souhaite que toute personne en situation de handicap puisse pratiquer une activité physique à proximité de chez elle, et ce projet risque de prendre un coup dans l’aile ».

« Le risque est que les collectivités donnent la priorité aux politiques publiques obligatoires et que le sport puisse en pâtir. L’impact sur les clubs risque d’être non négligeable et c’est l’accès à la pratique pour tous qui est menacé, ce qui n’est pas acceptable dans la continuité des Jeux olympiques. »

Gilles Erb, président de la Fédération française de tennis de table

à franceinfo: sport

« Les licences sont prises dans les territoires et on a besoin des collectivités, poursuit Guislaine Westelynck. Les clubs, les comités, sont des employeurs, ils ont des salariés parce que le bénévolat n’est plus suffisant, et on demande aux gens d’être toujours plus formés. Ils se forment mais il faut que cet effort soit rentabilisé. Si on ne peut plus les rémunérer, ça risque d’être dramatique pour le mouvement sportif ».

Pour surfer sur la vague des Jeux avant qu’elle ne se transforme en vaguelette, les présidents des fédérations espèrent désormais une « loi héritage » des Jeux, « qui serait un tremplin vers une société plus sportive, avec des volets éducatifs et de santé », selon Philippe Bana. Promise par l’ancienne ministre Amélie Oudéa-Castéra pour fin 2024, elle avait été reportée pour début 2025. Mais dans une interview donnée au journal L’Equipe, son successeur envisage, pour sa part, un « plan d’action jeunesse », dans lequel le sport serait « le cœur du réacteur » et qui serait validé « au cours de l’été ou à la rentrée 2025 ».

 

Source : www.francetvinfo.fr